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Nicolas Otton : « Nous nouons des liens renforcés avec les entrepreneurs. »

Alors que le contexte géopolitique est plus incertain que jamais, que l’inflation freine les élans et que les taux d’intérêt sont en hausse, les entrepreneurs français s’adaptent et l’entrepreneuriat se porte plutôt bien. Nicolas Otton, directeur de BNP Paribas Banque Privée France décrypte pour nous le contexte macro-économique dans lequel les chefs d’entreprise évoluent.

Diriez-vous que la France est une terre d’entrepreneurs ?
Absolument. Selon une enquête publiée en mars 2023 par Opinionway, près d’un Français sur quatre et plus de la moitié des 18-24 ans ont envie de créer une entreprise. La pandémie, loin d’avoir freiné l’esprit entrepreneurial des Français, a même exacerbé cette tendance avec un fort besoin d’indépendance, de réalisation personnelle et de sens. On observe donc une vraie accélération des créations d’entreprises ces dernières années en France, en très léger recul en 2023. Cet esprit entrepreneurial a quasiment doublé depuis dix ans. La France est d’ailleurs le seul pays d’Europe à connaître une tendance aussi dynamique.
C’est pourquoi nous nouons des liens renforcés avec les entrepreneurs, et ce dès le début de leur projet. Nos équipes collaborent étroitement avec les chargés d’affaires spécialisés sur les problématiques spécifiques aux entrepreneurs. Nous disposons également de 200 banquiers d’entreprises répartis sur le territoire et d’une centaine de banquiers privés spécialisés sur les actionnaires-dirigeants, exclusivement dédiés à l’accompagnement des dirigeants d’entreprise.
Par l’intermédiaire des écosystèmes de l’innovation de la Banque Commerciale en France de BNP Paribas, nous nous rapprochons aussi des dirigeants de startups et d’autres types d’entrepreneurs, afin de leur proposer une expertise complète de leur patrimoine professionnel et personnel.

Quelle est la part des femmes entrepreneurs dans votre banque ? Notez-vous une approche différente de leur part ?
En 2023, 43 % des créateurs d’entreprises individuelles sont des femmes, un chiffre qui a fortement augmenté ces trente dernières années. Chez BNP Paribas Banque Privée, nous accompagnons de plus en plus de femmes entrepreneurs. BNP Paribas s’engage d’ailleurs depuis de nombreuses années en faveur de l’entrepreneuriat féminin avec #ConnecterHers. Ce dispositif propose, depuis 2017, un accompagnement adapté en fonction du stade de maturité de l’entreprise. Avec 250 référents partout en France, la banque propose du mentoring et du coaching, notamment avec des experts crédit pour aider à construire un business plan ou calibrer les demandes de financements.

Avez-vous constaté l’émergence d’une nouvelle génération d’entrepreneurs après 2020 ? Si oui, en quoi sont-ils différents de leurs prédécesseurs ? Qu’ont-ils appris d’eux ?
En 2021, nous avons connu un doublement du nombre de clients entrepreneurs de moins de quarante ans. Cette tendance est d’ailleurs accentuée par l’entrée sur le marché des enfants de nos clients. La pandémie a accéléré la transmission d’entreprises et beaucoup de cessions et de regroupements se sont mis en place. Nous constatons que le patrimoine se construit de manière différente, il se crée de moins en moins par la transmission de biens immobiliers, mais davantage par la création et la cession d’entreprise. Nous observons également des changements de gouvernance dans les entreprises. Les transmissions entre générations s’accélèrent, notamment au sein des structures familiales.
Nous nous adaptons aux attentes de cette nouvelle génération qui souhaite davantage de réactivité, de proactivité, de personnalisation et d’autonomie. Les moins de quarante ans sont habitués, dans leur quotidien, à l’instantanéité. Nous leur proposons des services tels que ePrivate, un accompagnement entièrement à distance sur des horaires élargis avec un accès direct à nos experts en ingénierie patrimoniale et à nos conseillers en investissement. Ou encore MyMandate, une solution complètement personnalisée qui leur permet de choisir la construction de leur portefeuille, avec la possibilité de procéder à des réallocations en fonction de l’évolution du marché ou de leurs attentes.

Leur rapport à l’entreprise a-t-il évolué, dans le sens où garder la même entreprise, de sa création jusqu’à l’heure de la retraite, n’apparaît plus comme une évidence ? Les entrepreneurs du XXIe siècle sont-ils plus mobiles, plus opportunistes au bon sens du terme, plus enclins à prendre des risques ?
En effet, les plus jeunes entrepreneurs n’hésitent plus à céder leur participation pour se repositionner sur de nouveaux projets plus rapidement. Nous les accompagnons dans leur réflexion sur les interactions entre patrimoine privé et patrimoine professionnel. C’est un sujet primordial pour les plus jeunes entrepreneurs que nous accompagnons à tous les moments du cycle de développement de leur entreprise pour définir et mettre en place une réelle stratégie patrimoniale. Il faut, par exemple, réfléchir au choix du statut fiscal et social à la création de l’entreprise et au choix du régime matrimonial adapté pour le partage de la valeur créée dans l’entreprise. Nous évoquons aussi avec eux le crédit, lors du développement, pour réaliser des projets personnels qui pourront se mettre en place alors que la croissance de l’entreprise n’incite pas à la sortie de liquidités. Nous les appuyons pour structurer l’immobilier de l’entreprise mais aussi pour anticiper la meilleure structure pour être à même de sortir l’immobilier efficacement en cas de cession future, accompagnée de la volonté de le conserver dans la partie privée du patrimoine.

Malgré la conjoncture actuelle, l’inflation et un contexte géopolitique instable avec des interrogations liées à la guerre en Ukraine et au conflit israélo-palestinien, les entrepreneurs restent-ils confiants ?
Les entrepreneurs sont en effet affectés par de nombreux événements, le contexte géopolitique que vous évoquiez, une inflation qui persiste ainsi que la hausse des taux d’intérêt qui a tendance à freiner les projets d’investissement des entreprises. Néanmoins, le volume d’épargne des Français est au beau fixe et les marchés boursiers sont plutôt stables. Enfin, le bilan financier des entreprises en 2023 est globalement positif, ce qui permet d’entrer dans cette période complexe en bonne santé.

Cinquante pour cent des startups ne dépassent pas 5 ans d’existence. Concrètement, comment accompagnez-vous ces jeunes pousses pour leur permettre de dépasser ce cap ?
Les jeunes entrepreneurs ont besoin d’un accompagnement personnalisé de qualité pour faire fructifier leur entreprise, protéger leur patrimoine et leur avenir. Nous disposons de 200 banquiers en Europe qui proposent un accompagnement personnalisé à plus de 6 500 entreprises innovantes, de la startup à la licorne, tout au long de leur croissance, avec des produits et services adaptés à chaque étape de leur développement – de l’ouverture de compte à l’introduction en bourse, en passant par des solutions de crédit ou de gestion de trésorerie. Nous accompagnons 88 % du Next40 et 80 % de la French Tech 2030 avec 100 banquiers dédiés.
Ce dispositif intégré et déployé sur une quinzaine de pays permet également à ces jeunes entrepreneurs d’avoir accès à toute la palette de services du premier groupe bancaire européen, au travers des expertises des équipes de la banque privée, de la banque d’affaires, de l’assurance ou encore de l’immobilier.

Comment les chefs d’entreprise gèrent-ils leur argent aujourd’hui ?
L’inflation est revenue sur le devant de la scène après des années de quasi inexistence. Elle provoque une érosion de l’épargne puisque le rendement net devient négatif pour bon nombre de placements, à commencer par le fonds général des contrats d’assurance-vie.
Notre accompagnement pour maîtriser l’impact de l’inflation sur le portefeuille de nos clients est donc essentiel. Nous conseillons aux chefs d’entreprise de diversifier leurs placements de long terme, moins sujets à la volatilité des marchés, pour protéger leur épargne de l’érosion avec un fléchage sur le long terme dans l’économie réelle et vers l’investissement responsable.
En 2024, parmi les grands thèmes d’investissement que nous avons présentés l’été dernier, citons les rendements et les opportunités de revenus sur les marchés obligataires, les défis de la décarbonation et de l’électrification de l’économie, l’IA bien sûr, ainsi que les stratégies de diversification au-delà des actifs traditionnels.

On insiste beaucoup sur les placements socialement responsables. Constatez-vous un engouement de plus en plus fort dans ce sens ? Les entrepreneurs de 2024 sont-ils moins individualistes que leurs aînés et plus enclins à devenir des « business angels » ?
Nous constatons chez ces entrepreneurs une forte tendance à la recherche de sens pour leur épargne et de lien avec l’économie réelle et leur proposons un accès à des chargés d’affaires spécialisés dans des thématiques précises, comme la transition énergétique, mais aussi aux banquiers privés capables de proposer une gestion d’actifs adaptée à leur profil d’investisseur responsable. Cette tendance ressort très clairement dans l’analyse de nos mandats spécialisés dans ces thématiques. Leurs encours ont atteint 7,535 milliards d’euros à fin février 2024. Nous notons aussi le fort intérêt de ces entrepreneurs pour le non-coté (capital-investissement et immobilier) : cette classe d’actifs, illiquide, avec un seuil d’investissement souvent élevé mais offrant des performances attractives, réservée initialement à des investisseurs professionnels, s’ouvre plus largement ces dernières années avec succès.

On note une baisse significative des levées de fonds, les taux d’intérêt ont grimpé, l’avenir ne semble pas dégagé… constatez-vous un ralentissement de l’élan des entrepreneurs ou au contraire gardent-ils de grandes ambitions ?
Malgré les incertitudes liées à la conjoncture économique, les entreprises continuent à investir. Elles restent dynamiques en dépit d’un contexte macroéconomique plus complexe. Les entrepreneurs sont confiants dans la résilience économique de la France et font preuve d’une grande capacité d’adaptation et d’innovation. BNP Paribas Banque Privée, avec des revenus en hausse et une forte collecte nette en 2023, est à leurs côtés pour apporter des réponses personnalisées à leurs besoins patrimoniaux et financiers les plus complexes.

Propos recueillis par Cécile Olivéro

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